Sous son épaisse et flamboyante fourrure rousse, la renarde se croyait protégée. Oh bien sûr elle avait été blessée plus souvent qu'à son tour et cela la rendait méfiante. Elle ne fuyait pas ses congénères toutefois elle aimait son indépendance. Parfois au hasard d'un sous-bois, elle côtoyait quelques temps un autre animal mais la forêt était grande et chacun finissait par suivre sa propre route. La solitude la suivait telle une ombre et elle s'était accoutumée à l'avoir sur ses pas. Elle vivait sa vie, simple petite chose fragile et forte à la fois, jouissant du jour sans se soucier du lendemain. Il ne lui fallait que peu de choses, quelques baies, un peu de chasse, un point d'eau fraîche et la nature pour seule maison. Elle s'était construit un terrier bien à l'abri, où personne ne devait pénétrer sous peine de la voir montrer les crocs. Elle n'était pas très douée à vrai dire pour défendre son territoire, elle n'aimait pas se battre et n'aspirait qu'à la tranquillité. Il lui arrivait parfois de devoir abandonner son petit nid pour fuir les agressions extérieures. Alors patiemment elle reconstruisait ailleurs ce qu'elle avait peiné à bâtir, un lieu sûr où s'abriter.
Les jours s'écoulaient plutôt paisiblement, quelques nuages, un peu de pluie, quelques blessures. La vie est ainsi faite et la renarde l'avait appris. Seulement un jour comme tant d'autres, elle croisa la route d'un chasseur d'une agilité certaine puisque sa flèche lui transperça les flancs. Apeurée, perdue, la pauvre créature souffrait horriblement, un mal si aigu qu'il lui parut insupportable. Un instant elle pensa à cesser de lutter et à se laisser tomber là, pourtant l'instinct de survie fut le plus fort. Péniblement elle se traîna jusqu'à un endroit plus sûr, la douleur menaçait de la submerger à chaque pas. Le chasseur lui avait disparu comme il était venu. Ce n'était pas la première fois qu'elle avait affaire à un humain. Bien souvent elle était tombée dans un de leurs pièges, elle en gardait des cicatrices cachées sous son pelage. Cette plaie là était bien plus profonde et plus grave, elle ne pouvait l'ignorer. Elle se rétablit comme elle le put, la déchirure peinait à se refermer. Mais la renarde était forte et la nature a aussi cette magie là. Après un long moment à éprouver de grandes difficultés à se mouvoir et à sortir de sa cachette, la renarde recommençait à vivre normalement ou presque. D'autres jours passèrent, la douloureuse aventure était toujours présente sous cette petite tête rousse mais elle continuait malgré tout ses activités habituelles. Le malheur voulu qu'une mauvaise chute rouvre la plaie. Elle essaya de regagner son terrier, un animal blessé est une proie facile etpour cela elle devait se mettre à l'abri. Seulement elle avait perdu trop de sang et du même coup ses forces. Après avoir survécu à un coup mortel, la voilà qui succombait suite à une maladresse. Lorsqu'elle reprit connaissance, deux grands yeux la fixaient. Sans qu'elle s'y attende, l'elfe la ramassa et l'emporta loin d'ici.
Les premiers jours elle fut méfiante malgré les bons soins que l'on lui prodiguait. On se laisse rarement approcher deux fois lorsque l'on a connu la souffrance. Elle observa l'elda qui en retour la regardait. Très vite elle fut intriguée par cette douceur, par cette aura différente de ce qu'elle avait connu. Elle remarqua qu'on ne cherchait pas à la blesser d'avantage, cependant elle demeura sur ses gardes. Les jours passant, la renarde finit par se laisser approcher et même à prendre goût à cette compagnie. Puis ce furent les premières caresses et elle aima cette douceur autant qu'elle la craignait. Elle ne comprenait pas tout à fait son langage, elle devinait simplement ou le lisait dans son regard. L'animal au roux pelage se sentait aller mieux chaque jour et l'elfe lui laissa sa liberté. Elle en fut surprise, elle pensait que l'elda appréciait aussi sa présence. Elle avait croisé certains de ces animaux dits familiers que l'on enchainait à une corde ou enfermait dans un enclos. Les humains étaient difficilement compréhensibles décidément. Pourtant malgré la porte ouverte et l'appel de la forêt, la renarde n'arrivait pas à s'éloigner de la main qui l'avait soigné. Alors contre toute attente elle resta à côté de l'elfe. Elle savait que c'était dangereux de s'attacher ainsi, contre nature un peu aussi. Elle prit le risque. A partir de ce jour elle n'était plus un animal sauvage, elle avait été apprivoisée.