Andewen marchait d’un pas rapide, il faut dire que ces temps ci elle en parcourait des lieues et des lieues de ses petites jambes. Elle n’était pas habituée à marcher sur de longues distances. Auparavant même si elle avait traversé de nombreux territoires, elle l’avait toujours fait en selle, sur une des montures du bataillon qu’elle accompagnait. Cette pensée lui serra le cœur. Elle avait l’impression que ce passé là était si loin. Ceux qu’elle avait toujours considéré comme sa famille, elle leur avait dit au revoir au Havre Gris. A ce moment là elle pensait encore qu’elle prendrait le bateau suivant, mais chaque fois elle regardait les voiles s’éloigner sans être à leur bord.
Des jours avaient passé depuis. Elle avait découvert de nouvelles contrées, aborder bien des gens dans sa recherche et s’était vue claquer au nez de nombreuses portes. Ou alors on lui demandait un service lui faisant miroiter une information. Elle avait dû se trouver une épée et se battre. C’était bien différent des escarmouches que son père et elle échangeaient lorsqu’il s’amusait à lui apprendre à manier le fer. Cela avait été un jeu mais qui se révélait bien utile à présent. Tandis qu’elle suivait l’armée dans son enfance et jusqu’il n’y avait encore pas si longtemps, elle avait assisté à moultes batailles et avait vu des plaines se vêtir de rouge tandis que le soleil se levait après une nuit atroce de bruits de lames qui s’entrechoquent, de cris, de douleurs. Pourtant transpercer elle-même un corps, faire couler le sang par sa propre arme cela n’avait rien de comparable. Au début cela lui provoquait des hauts le cœur, mais à présent elle s’y était habituée. Le monde devenait fou.
Seule dans ces terres qu’elle ne connaissait pas, parmi ces villageois qui sollicitaient toujours plus d’aide car eux même étaient désespérés, se rendre utile ainsi lui faisait oublier son chagrin. Mais bien vite cela ne suffit plus. Elle avait l’impression de se perdre elle-même. Et justement bien loin de ses manières sages et surtout de sa timidité maladive elle avait osé ! Elle avait abordé un jeune homme qu’elle ne connaissait pas. Il semblait si sûr de lui, si courageux que soudain elle avait eu envie de retrouver la protection qu’elle avait toujours connu. Ainsi tous deux avaient fait connaissance. Elle lui avait avoué à demi mots combien elle se sentait seule et perdue par ici. Lui y était né et y avait grandi. Il avait même des compagnons dont il vanta la fidélité la générosité. Il lui cita un nom Llestael, un elfe comme elle. Elle avait du mal à croire qu’il y avait d’autres elfes ici. Très vite elle l’avait contacté, passant une fois de plus outre sa timidité. Il s’était montré d’une extrême gentillesse envers elle et grâce à lui, comme à Edeith qui lui avait tendu la main, elle avait rejoint les Ombres. Enfin elle n’était plus seule à se battre, enfin elle réalisa que le sang versé n’était pas vain. Elle luttait vraiment pour une cause, celle des Terres du Milieu. Pour la première fois de sa vie elle accomplissait réellement quelque chose, pour la première fois de sa vie elle était quelqu’un.
Pourtant malgré cela elle se sentait toujours un peu perdue et surtout elle était inquiète. Il fallait qu’elle le retrouve. Alors profitant d’un courrier qu’elle devait porter dans un nouveau lieu, elle marchait à bonne allure, le cœur battant. Enfin, elle aperçut une bâtisse sur le côté, son toit semblait s’être effondré. Plus elle s’approchait et plus l’endroit semblait être dévasté. Elle fut surprise de trouver quelqu’un devant ce qui n’avait d’auberge guère plus que le nom. A l’intérieur, elle vit rapidement qu’il y avait tout de même de nombreuses personnes. Attentivement elle scruta la salle mais il n’était pas là. Elle s’avança jusqu’au comptoir et remit le courrier au tavernier, profitant pour lui évoquer un nom mais il n’évoquait rien pour lui, pas plus que la description qu’elle lui fit ensuite. L’homme n’était guère affable ni patient aussi elle n’insista pas d’avantage. Dépitée, elle prit juste une gorgée d’eau à sa gourde et repartit retrouver ses nouveaux compagnons auprès de qui elle trouverait sans doute réconfort. Andewen était secrète et ne parlait à personne de tout cela, la présence de gens chaleureux et qui l'appréciaient sans doute un peu suffisait à apaiser sa peine.