discussions et sentiments

Andewen était envahie par une profonde mélancolie ces derniers jours et quoi qu’elle fasse son entrain habituel n’était plus au rendez-vous. Pire que cet état de flottement dans lequel elle se sentait, il y avait tous ces doutes qui la rongeaient. Llestael était revenu de sa période d’isolement choisi, et il semblait heureux de vivre. Peut être qu’elle aussi trouverait ses réponses dans l’éloignement. De toute façon il fallait qu’elle se rende aux Havres Gris. Elle ne le trouvait pas, il était peut être reparti là-bas et l’attendait.

Elle alla donc trouver Dame Melwaen et lui demanda la permission de partir au moins quelques jours, s’excusant de ne pouvoir l’aider pendant ce temps. Bien sûr l’elfe lui dit qu’elle n’avait aucune permission à donner et que son aide était libre. Mais elle lui dit aussi qu’elle ne devrait pas partir seule, qu’elle s’inquiétait pour elle. Andewen la rassura comme elle pouvait, elle avait besoin de s’éloigner et elle avait quelque chose à vérifier là-bas. Elle partit donc avec l’assentiment de la dame mais envoya d’abord quelques mots à Llestael pour ne pas qu’il s’inquiète. Elle lui demanda de transmettre le message à Edeith, elle ne pouvait se résoudre à lui écrire elle-même de peur de le blesser d’avantage.

Elle avait chevauché à brides tendues, ne se rendant pas compte de la vitesse à laquelle elle forçait sa monture à galoper. Elle faisait subir à la pauvre bête toute la tension qu’elle-même avait accumulé. Tout le chemin elle ressassa ses pensées encore et encore, cherchant une lueur dans la pénombre. Mais rien ne vint. Enfin elle arriva aux Havres Gris bien plus vite qu’elle ne l’aurait cru. Son cheval était harassé ce qui lui serra le cœur et la fit se sentir un peu plus coupable. Elle se rendit vite vers les quais et interrogea les équipages. Personne ne put lui répondre mais on lui indiqua le teneur de registres. Elle alla le voir, le nom qu’elle cherchait n’était répertorié nulle part. Il n’était donc pas parti sans elle. Elle fouilla ensuite la ville mais il n’y était pas non plus et aucun courrier à son nom à elle ne l’attendait. Ses espoirs envolés une nouvelle fois, elle s’assit au bord de l’eau. Une elfe vint la trouver, lui demandant quand est ce qu’elle embarquait. Andewen ne put lui répondre tant sa gorge était serrée tout comme son cœur. Peut être que la solution était là et qu’elle devait partir. Elle repensa alors aux Ombres et se rendit compte que non elle ne voulait pas les quitter. Finalement et malgré ses doutes s’étaient parmi eux qu’elle se sentait à sa place. Sans doute était il temps qu’elle arrête de chercher les réponses ailleurs que dans son propre cœur. Un peu plus sereine, elle reprit la route vers Bree.

Mais comme rien n’est jamais simple, un nouveau tourment vint s’ajouter aux siens. Llestael lui demanda ce quelle ressentait pour lui. La jeune elfe se sentait des plus mal à l’aise. Ses sentiments pour lui n’étaient pas ce qu’ils auraient dû être et elle savait que cela compliquerait tout. Il aimait Neyge et pas elle, elle s’était fait une raison et comptait bien garder secret son amour. Seulement elle ne pouvait lui mentir, elle lui avoua donc qu’il régnait sur son cœur. Elle ajouta qu’elle savait qu’il ne partageait pas ses sentiments et qu’elle ne lui demandait rien de plus que ce qu’il lui offrait déjà : son amitié qu’elle estimait comme un bien des plus précieux. Pourtant il insista pour qu’ils parlent tous deux le plus tôt possible mais auparavant il devait s’absenter.

Le hasard la fit croiser Amy. Andewen estimait beaucoup la chasseuse, elle enviait sa sérénité toujours apparente. Justement l’eldar voulait lui parler, elle avait perçu son trouble de ces jours–ci et lui en demanda la raison. Elle ne pouvait se résoudre à parler des sentiments d’Edeith à son égard, elle ne voulait pas le trahir. Elle parla juste à demi mot, indiquant qu’elle avait perdu l’amitié de quelqu’un qui lui était cher car elle l’avait blessé sans le vouloir. Elle alla même jusqu’à avouer qu’elle était rongée par le doute. Etrangement Amy semblait lire en elle-même si elle ne sondait pas la teneur du problème, elle en devinait les contours. Elle la rassura et parla avec sagesse. Le passé lui dit elle n’est pas le plus important, ce sont nos actes présents qui font de nous ce que nous sommes. Elle lui dit aussi qu’elle était importante au sein des Ombres et qu’elle-même l’appréciait. Elle lui conseilla de faire preuve de plus d’assurance et d’aller de l’avant plutôt que de lutter contre les démons de ses origines. Ce fut comme une révélation pour Andewen. Comme si on lui donnait la clef d’une porte qu’elle avait tentée de forcer depuis des siècles. Elle remercia Amy, lui disant qu’elle était une elfe merveilleuse. Sa nouvelle amie était contrariée à cause de Llestael. Il l’avait blessé avoua t’elle en énonçant certaines choses et leur amitié était perdue. Cela peina beaucoup notre jeune elfe. Elle essaya de réconforter sa compagne, lui indiquant que selon elle l’eldar appréciait bien trop Amy pour vouloir la blesser intentionnellement. Mais la chasseuse ne voulut pas s’étaler sur le sujet, indiquant qu’elle comptait bien régler le problème au plus tôt. Andewen lui souhaita donc de réussir.

Parallèlement une discussion éclata au sein des Ombres et l’elfe pour qui elle nourrissait des sentiments était de nouveau au cœur du sujet. Cette fois il s’avérait que des rumeurs circulaient à son encontre et visaient à tâcher sa réputation. La menestrelle écouta en silence, troublée par toutes ces choses. Mais déjà Llestael dont il était question, sollicitait une entrevue. Elle s’y rendit, appréhendant ce qu’il avait de si important à lui dire. Il commença par parler de ses sentiments pour Neyge dont il avait fait le deuil malgré la plaie encore ouverte. Il lui parla d’une jeune femme qui lui plaisait même s’il était trop tôt pour qu’il l’aime. Elle s’appelait Amallia et l’avait maintes fois réconforté, apaisé. Il ajouta qu’il tenait à Andewen et que sa révélation l’avait troublé. Tout ce temps là elle s’acharna à lui faire comprendre qu’il ne lui devait rien, qu’elle n’attendait rien de lui et qu’elle savait déjà que son cœur à lui ne battait pas à l’unisson du sien. Elle le pria de ne pas faire naître en elle de faux espoirs car à l’heure actuelle elle n’en avait aucun. Il confirma qu’il ne pouvait rien lui promettre mais qu’il ne pouvait non plus affirmer qu’il ne l’aimerait jamais. C’est à ce moment là qu’Edeith fit son apparition. Il les regarda comme s’ils avaient commis un crime et qu’il les jugeait. Llestael prit congé, il devait parler à Amallia.

Le gardien et la menestrelle se rendirent en haut de la colline donnant sur Bree. Il eut des paroles très dures à son encontre. Très vite les émotions qui bouillonnaient en elle ne purent être contenues d’avantage et les larmes inondèrent ses yeux. Ces mots, ces sous entendus étaient comme autant de lames acérées qui la blessaient. Comment pouvait il penser tout cela d’elle ? Il insinuait qu’elle s’était jetée sur Llestael, malgré Neyge, malgré lui. Il l’accusa de l’avoir trahi, lui reprocha de ne pas lui avoir avoué ses véritables sentiments et donc de lui avoir menti. Elle se défendit indiquant que jamais elle n’aurait avoué à quiconque ce qu’elle éprouvait pour son parrain mais qu’il lui avait demandé et qu’elle ne voulait pas mentir. Elle lui expliqua qu’elle pensait que lui dire qu’elle en aimait un autre l’aurait selon elle encore plus blessé. Il finit par lui dire que plus rien ne serait comme avant entre eux. Andewen regarda le soleil se coucher sur la ville. Le spectacle était magnifique mais pas assez fort pour apaiser sa peine. Les paroles d’Amy étaient bien loin déjà, la nuit se levait, propice au retour des démons les plus terribles.

Invité

Pendant son absence, il avait gardé le contact avec Amallia, par courrier. Valentinia servait de relais entre les deux jeunes gens. Amallia avait eu des propos apaisant. Il souhaitait la revoir. Il la retrouva à Bree. Elle avait aussi grand plaisir à le revoir. Ils s'isolèrent au petit jardin. Ils discutèrent longtemps. Llestael flirtait. Il le dit à Amallia. Il n'était pas amoureux, mais la jeune femme, enjouée, souriante, lui donnait envie de flirter, ou tout du moins de vouloir la connaître mieux, et advienne que pourra pour la suite. Amallia prit la chose avec un sourire, elle semblait flattée.

Ils se virent plusieurs fois. A la sortie d'une de ces rencontres, il croisa Andewen. Llestael en profita pour lui poser une question qu'il avait en tête depuis son retour.

" Andewen ? L'autre soir, vous m'avez dit que je vous était très précieux "

" Oui, vous m'êtes très précieux "

Comme à chaque fois qu'elle disait cela, elle fixait intensément Llestael, droit dans les yeux.

" A quel point Andewen ? "

Elle garda le silence. Puis sembla décider de parler.

" Je vous aime "

Elle baissa les yeux. Llestael était surpris. Il sentit une étrange sensation, un trouble.

Elle lui dit qu'elle n'attendait rien en retour. Qu'elle savait qu'il aimait ailleurs, que son amitié lui suffisait grandement. Il l'interrompit : il n'aimait pas. Du moins pas encore. Il devait partir. Il s'excusa auprès de la jeune femme. Il ne pouvait rester. Mais il insista pour lui parler un peu plus tard. Devant l'insistance de Llestael, elle accepta.

Ils se revirent plus tard. Andewen était dans son refuge. Un lieu tranquille, pensait elle. Elle jouait de la harpe. Llestael entra. Ils commencèrent à parler. Llestael voulait être honnête avec la jeune femme, il voulait toujours être honnête. Il lui parla de ce qu'il vivait en ce moment. La perte de Neyge, la rencontre d'Amallia, le plaisir qu'il avait à passer du temps avec elle. Andewen savait tout ça. Elle insistait en disant qu'elle ne demandait rien. Llestael lui dit simplement que sa déclaration avait causé un grand trouble en lui.

A ce moment précis, Zairakharan, une amie d'Amallia entra dans la pièce. Elle entendit les derniers mots prononcés par Llestael. Bien sur, elle les interpréta mal, n'ayant entendu qu'une partie de la conversation. Llestael lui dit qu'elle pouvait aller voir Amallia, si elle le désirait : il n'avait, une fois encore, rien à cacher.

Il sorti de la maison, Andewen à sa suite, et tout deux se mirent en quête de trouver un endroit plus tranquille pour terminer leur conversation. Ils pensèrent le trouver au Poney, dans un pièce isolée.

Llestael reprit donc la conversation. Il était troublé, mais qu'il ne savait pas ce que c'était. Elle avait comme ouvert une porte. Il la mis en garde :

" Je ne peux vous empêcher de pousser cette porte. Mais je ne peux pas vous certifier ce que vous allez y trouver. Bonheur ou douleur. Amour ou simple amitié. Je ne peux rien vous promettre. C'est à vous de voir. "

Andewen comprenait. Elle déposa un baiser chaste sur la joue de Llestael, qui hésita, puis finalement s'abstint de le lui rendre.

Il y eu une toux. Edeith était là qui les observait. Andewen était gênée. Edeith visiblement irrité. Llestael sentit qu'ils devaient se parler. Il les laissa, après une dernière recommandation au jeune homme :

" Conduisez vous correctement "

Une fois hors du Poney, il se mit à la recherche d'Amallia. Il pensait qu'elle serait près du jardin. Elle y était. Et comme il s'y attendait, Zairakharan était là, ainsi que Sighil et un homme qu'il ne connaissait pas. Il salua tout le monde, tranquillement, sentant de l'hostilité, non pas de la part d'Amallia, mais de ses amis. Il s'expliqua calmement. Amallia souriait. Il lui dit qu'il n'avait rien promis à la jeune elfe, ni à la jeune femme. Que seul l'avenir dirait ce qu'il adviendrait de cette histoire.

Le ton s'apaisait. Une Ombre sorti du jardin à ce moment ; Aratern. Il avait entendu une partie de la discussion et semblait s'en amuser. Il provoqua un peu Llestael, lui rappelant ses paroles sur l'Amour unique. L'elfe le perça du regard :

" Cet amour là est mort, et tu le sais "

Le ton était sec.

" Du calme mon ami… Je vois que tu tournes la page… Je suis content pour toi. Neyge est frivole… Tu mérites mieux qu'elle. "

Les esprits étaient calmés. Amallia avait compris. Llestael ne s'était engagé à rien avec elle. Elle le savait. Il ne lui avait rien caché, elle le savait aussi. Et il serait venu lui parler d'Andewen, même si Zairakharan ne les avait pas vus, elle l'avait compris.

Llestael les quitta. Il alla prendre une chambre au Poney, comme à son habitude. Il eu beaucoup de mal à trouver le sommeil. Toute la nuit résonnait dans son esprit les paroles d'Andewen. Elles faisaient écho au trouble qu'il ressentait.

Au matin, sur de lui, de son affection, et de son envie, il posta un courrier à Andewen.

" Très chère Andewen,

Les paroles que vous avez tenu hier ont semé le trouble en moi. Toute la nuit, je les ai entendues. Elles ont eu le pouvoir de faire naitre quelque chose en moi. Je vous en prie, Aidez moi. Aidez moi à aimer. Apprenez moi à vous Aimer…. "

Il avait aussi décidé de parler à Amallia, en espérant qu'il ne la blesserait pas. Il eu un message d'Andewen lui disant que son courrier l'avait touché. Il demanda à la voir un peu plus tard. Elle accepta.

Llestael se remit à la recherche d'Amallia. Ils discutèrent un moment. Il lui expliqua calmement qu'il souhaitait tenter de trouver le bonheur avec Andewen. Amallia comprenait : elle n'avait d'ailleurs pas l'intention de laisser Llestael aller jusqu'au bout du petit jeu qu'il y avait entre elle et lui.

Ils étaient donc soulagés tous les deux. Ils passaient de si bons moments ensemble. Cette amitié là au moins serait préservée.

Llestael pu alors, l'esprit détaché de tout problème, le cœur léger, retrouver Andewen, pour parler ensemble du courrier qu'il avait envoyé. Elle était à Nain Eddith. Il s'y rendit sur le champ, et trouva la jeune fille. Ils se rendirent à Ost Guruth, dans un endroit isolé, tranquille… Et ils parlèrent… Beaucoup…

Mais cela est une autre histoire.