Finsûl et Perledo
Finsûl avançait, fier et heureux, dans la résidence de Falathlorn. En effet, il tenait par la main Perledo, sa compagne. Mais à la façon dont elle lui tenait la main, il la sentait inquiète. Il n'aimait pas cela, et avait toujours envie de la prendre tendrement dans ses bras, la serrer fort contre son cœur, la câliner et la réconforter, la rassurer en lui donnant toute la tendresse et l'amour qu'il éprouvait pour elle. Il la regarda trottiner à ses côtés, sa grosse hache ballotant le long de sa hanche. Et il se souvint de leur rencontre…
Une belle journée comme il en existait tant dans le Forlindon. Le Soleil radieux avait chassé tous les nuages ne laissant apparaître que le bleu du ciel. L'air frais, amené par une légère brise que l'on pouvait encore qualifier de marine, était des plus agréables. Cela rendait Finsûl très bucolique. Il adorait se promener dans ce petit bois au pied de l'Ered Luin. Le chant des verts feuillages des grands arbres de cette forêt, impulsé par ce léger vent, lui parvenait aux oreilles comme une douce mélopée. Et la musique ça le connaissait. Finsûl était le plus grand ménestrel d'au moins tout le Lindon, si ce n'était de l'Eriador, comme il aimait à le penser. De plus le vent soulevait quelques mèches de sa longue chevelure noire, ce qui lui donnait un air irrésistible de… personnage connu vantant les mérites d'un produit d'entretien pour les cheveux leur rendant leur vité et leur clanure, produit à base d'ingrédients très exotiques qu'on a été cherché très très loin. Juste pour vos cheveux.
Bref Finsûl était un Elfe mince et svelte, comme tous les Elfes, avec de longs cheveux noirs cachant ses oreilles pointues et de magnifiques yeux bleus. Cependant il n'avait pas la carrure d'un champion ou d'un gardien. C'était un ménestrel qui aimait les fleurs…Sa musculature était fine mais puissante. Son visage allongé lui conférait un certain charme, voire même un charme certain. Sa bouche possédait de délicats contours qu'on prenait plaisir à redessiner avec les yeux. Sa fine peau était d'une douceur incomparable et son nez découpait parfaitement son visage.
Donc Finsûl rendu bucolique par cette superbe météo, s'en fut allé cueillir quelques jolies fleurs. Il adorait ce bois, de par sa beauté et des trésors qu'on pouvait y trouver. La lumière de cette mi-journée était des plus agréables. Il se promena entre les arbres espacés idéalement pour que chacun d'entre eux reçoive la lumière nécessaire à une croissance parfaite. L'herbe douce se pliait à peine sous ses pas légers d'Elfe. Il connaissait bien cet endroit. Ce n'était pas la première fois qu'il venait ici.
Ainsi il cueillait quelques fleurs avec la douceur et la délicatesse qui le caractérisent, s'approchant au fur et à mesure de l'entrée d'une grotte qu'il avait à peine remarquée. Sans doute le manque de lumière de cet endroit ne l'intéressait-il pas, préférant porter toute son attention sur ce qu'il aimait. Il se pencha pour admirer une fleur qu'il avait déjà repérée d'un peu plus loin. Il était émerveillé par cette dernière, la nature faisait vraiment de très jolies choses. Yavanna est vraiment la plus grande des Valar. Il s'accroupit lentement, tenant amoureusement son bouquet de petites et jolies fleurs ramassées ces dernières minutes dans la main gauche, afin de cueillir cette création de la nature et l'ajouter à son "butin".
Il approcha sa main et entendit tout à coup un bruit sourd, informe, inidentifiable devenant de plus en plus fort, semblant se rapprocher en fait. Il releva doucement la tête en fronçant les sourcils et commença à regarder autour de lui, derrière et sur la gauche, pour tenter d'identifier la nature et l'origine de ce bruit.
"aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA!!!!!!"
A l'instant précis où il se rendit compte que tout ce boucan provenait de sa droite et qu'il amorça un pivotement de la tête afin de savoir ce qui pouvait provoquer autant de tintamarre, il fut percuté et se retrouva les quatre fers en l'air, toutes ses fleurs volant dans les airs, avec quelque chose qu'il n'aurait jamais cru possible. Dans ses bras, la plus merveilleuse des fleurs avait remplacé son bouquet qui, à côté d'elle, paraît dorénavant tellement terne et sans aucun intérêt. Une Elfe, la plus belle qu'il n'ait jamais vue, protégée par une robuste armure et portant un petit bouclier sur son avant-bras gauche. Dans sa main droite, rien. Une hache de correcte facture gît sur le sol à côté d'elle. Elle possédait des cheveux noirs mi-longs, coupés au-dessus des épaules, une délicieuse et fine bouche sur laquelle il aurait voulu s'abîmer ainsi que de(ux) magnifiques yeux bleus d'une profondeur infinie dans laquelle il se serait noyé si les évènements ne s'étaient pas enchaînés aussi rapidement. Elle possédait des courbes parfaites, à en faire rougir les Valar, et était légèrement plus petite que lui, même si cette dernière information était difficile à juger au vu de leurs positions respectives.
Dans les instants qui suivirent, tout se passa très vite. Finsûl eut à peine le temps de réaliser ce qui venait de se produire. La jolie Elfe se releva, visiblement furieuse, et gronda:
"Mais enfin vous ne pouvez pas faire attention?!! Vous m'avez faite tomber!
- Mais c'est vous qui m'avez percuté, je ramassais des…" balbutia-t-il.
"Mais ne racontez pas de bêtises!" l'interrompit-elle.
"Vous êtes en plein milieu du chemin! Quelle idée peut-on av…oulala!" Elle arrêta de parler, enfin de hurler, de façon nette et soudaine, tournant subitement la tête en direction de l'entrée de la grotte d'où provenaient quelques grognements. La colère fit place à l'inquiétude, mais une très légère inquiétude seulement, sur le visage de Perledo. En une fraction de seconde, elle ramassa sa hache, se redressa tout en l'accrochant à la ceinture et couru en direction de l'arbre le plus proche dans lequel elle tenta de grimper le plus rapidement possible, sans doute mue par quelque instinct de survie. Finsûl, quelque peu perdu, ne sachant où donner de la tête, vit cette charmante Elfe, de dos, accrochée aux branches les plus basses d'un arbre mouliner des pieds comme une forcenée pour trouver une prise, le postérieur légèrement en arrière (qu'il se dit fort joli d'ailleurs). L'instant d'après, il tourna la tête vers les grognements venant de la grotte et vit débouler trois gros ours se ruant dans sa direction et visiblement dérangés en plein milieu de leur repas car ils n'avaient pas l'air très contents. En fait furieux serait le terme exact. L'idée de rester l'arrière-train collé au sol ne lui traversa pas l'esprit un seul instant. Il se releva rapidement à son tour et fit face à cette horde d'ours venant sur lui, piétinant toutes ses fleurs tombées à terre et qu'il décida de défier. Pourquoi? Bonne question… A chacun son idée.
Finsûl s'équipa de sa mandoline afin de scander quelque chant d'encouragement pour….lui-même. Les 3 ours sur lui, il rangea son instrument de musique, pensant que ces créatures ne sauraient jamais apprécier ses balades romantiques, et dégaina son puissant gourdin afin de les mâter. Enfin il dégaina son puissant bout de bois avec un clou au bout pour faire mal. Un hurlement de terreur fit fuir un premier ours. Sur les deux autres ours, il tapa, tapa, tapa, c'était sa façon d'aimer. Il combattit avec vaillance et courage ces créatures féroces et sanguinaires. Ses coups précis et mortels (en tout cas c'est ainsi qu'il espérait qu'ils soient perçus) eurent raison des deux bêtes. Puis revint le troisième ours, encore plus fâché que tout à l'heure. Alors il se montra exagérément fier et téméraire, se tenant bien droit, gonflant son torse, esquissant un sourire exprimant une infinie confiance en soi afin d'impressionner un public se trouvant dans son dos. La bête, bien évidemment, n'avait cure de tout ce cinéma et continua sa course sur le jeune ménestrel. Mais quelques coups de mandoline et de clou plus tard, celle-ci gisait à terre avec ses deux congénères.
Finsûl se retourna en direction de Perledo et en perdit son fier sourire. Il la vit dans la même position que précédemment à ceci près que le mouvement des jambes avait cessé. Elle pendait de tout son long aux deux seules branches qu'elle avait pu attraper. Elle finit par lâcher ses branches et se retourna vers lui, n'ayant apparemment rien perdu de son assurance, ni de son aplomb.
"Vous les avez eus?" demanda-t-elle.
"Oui" répondit-il simplement en se grattant la tête avec un sourire de gêne.
"Vous savez, ils grognent fort mais ne sont pas si costauds que cela. Mais je vois à votre armure et à votre bouclier que vous êtes gardienne…
- Evidemment!" dit-elle en haussant la voix. " Vous n'étiez pas au fond de la grotte avec moi! Ces bêtes sont très terrifiantes dans le noir. Vous pensez bien que je les aurais massacré si j'avais vu que ce n'étaient que des ours! Espèce de jeune prétentieux!
- Mais non enfin…je ne voulais pas…" bégaya-t-il bêtement.
"Oui bien sûr…" fit-elle ironiquement.
Il hésita.
"Que veniez-vous chercher dans cette grotte?
- J'ai entendu parler d'un trésor, d'un objet précieux qui serait resté dedans.
- Ah bon? C'est étrange, je n'ai rien entendu de particulier sur ce coin…
- Mais enfin! Je sais tout de même ce que j'ai entendu!
- Non, enfin je ne mettais pas votre parole en doute…
- Mais bien sûr…" répondit-elle avec une pointe de scepticisme, à moins que ce ne soit de l'ironie…
- Euh, je m'appelle Finsûl.
- Moi c'est Perledo. Contente de vous connaître.
- J'en suis enchanté. Je ramassais des fleurs mais je crois qu'elles n'ont pas apprécié nos amis les ours.
-Non, pas du tout même. Voulez-vous que nous en cueillions d'autres?" demanda-t-elle aimablement, y voyant une occasion de faire une nouvelle connaissance.
"Avec grand plaisir!" Jamais il n'aurait pu, même avec toute la volonté du monde, dissimuler l'immense joie qu'il éprouva à cet instant.
Le temps avait passé…de longs mois. Ils ne s’étaient plus quittés. Perledo veillait sur lui comme sur la prunelle de ses yeux. Aucune bête, aucun humain, aucun orque qui se montrait menaçant ne pouvait approcher Finsûl. D’un bond (deux tout au plus), elle s’interposait entre lui et le danger qui le menaçait. Armée de sa grande hache, elle pourfendait quiconque voulait du mal à Finsûl. A force de batailler ensemble, elle était devenue une grande guerrière…une gardienne.
Et lui, chaque jour qui passait, lui chantait de jolies chansons, lui offrait des fleurs, toutes plus odorantes les unes que les autres. Mais surtout, il lui prodiguait des soins. Il ne pouvait supporter de la voir blessée et passait son temps, le nez dans ses livres, à chercher des moyens de plus en plus efficaces pour la soigner. Il était devenu un grand érudit et un grand ménestrel.
Aujourd’hui, ils étaient là, dans cette magnifique résidence de Falathlorn, côte à côte, main dans la main. Ils cherchaient la maison des Ombres.
Ensemble, ils venaient mettre au service de cette confrérie leurs épées et leurs connaissances.