Assis comme à son habitude devant la cheminée, fumant l'Herbe des Gens de la Comté, le Chasseur contemple pensivement les flammes. S'apercevant soudain de votre présence, il vous adresse un sourire, vous faisant signe de vous asseoir auprès de lui.
A la manière des Elfes de la forêt, il est vêtu de vert et de brun; mais lorsqu'il passe au Salon de la Confrérie il troque facilement son arc pour le luth. L'instrument repose près de son siège, comme un fidèle chien de bois.
"Peut-être pourrez-vous m'éclairer...je me demandais si beaucoup parmis les Ombres avaient entendu des témoignages des Jours Anciens. Vous-même, dites-moi, qu'en est-il ? Les noms de Lùthien, Maglor, Nùmenor...vous sont-ils familiers ? Car j'envisage de passer quelque temps à apprendre les écritures elfiques, afin de consigner ma propre expérience de ces âges révolus. Mais avant que de m'atteler à pareille tâche, j'ai envie de savoir si mes amis en tireront profit."
L'Elfe envoie pensivement un rond de fumée bleue vers le plafond de la salle, où d'autres flottent déjà comme d'étranges oiseaux de brume.
"Il y avait un chant...on l'entonnait en Neldoreth, il y a bien longtemps, lorsque l'aube s'annonçait dans le ciel et que tombait la rosée. Car tous mes récits ne sont pas de bataille ou grand évènement; il y en aurait aussi parlant des plaisirs simples, et des chagrins ou de sources de joie. La chanson dont je vous parle serait de cette sorte. Dans le langage des Hommes, cela donnerait ceci:
Sur les pétales froids est tombée la rosée
Comme sur le ciel noir où les étoiles luisent
J'ai cherché sur les herbes le pas du cerf pressé
Courant à travers bois, il courre et il s'épuise
Tombe, tombe, descends Lune d'argent
Comme les étoiles meurent et la Lumière s'étend
Sur les chemins des plaines luisant dans le matin
J'ai recherché son pas pour lui percer le flanc
A l'horizon le cerf toujours courrait au loin
Sur son front en couronne scintillent ses bois blancs
Tombe, tombe, descends Brume sans bruit
Comme le matin passe et la Lumière grandit
Au soir finalement, après une course sans fin
Je l'ai trouvé, vaincu, étendu près du lac:
Dis-moi pourquoi alors, à la pointe de mon arc,
Je n'ai pas pu abattre le bel animal brun ?
Viens, viens, remonte tout là-haut
Ô toi dont la Beauté guide ma ritournelle
Il viendra un matin, une rosée nouvelle
Et la vie épargnée s'élancera de nouveau."