Andewen
Nombre de messages : 21 Race : Elfe Classe : Maître du savoir Date d'inscription : 30/06/2008
| Sujet: Un soir au coin du feu Ven 13 Fév - 19:25 | |
| Andewen n'aurait pu dire comment elle s'était mise dans ce pétrin. Après avoir passé une heure à aider Dame Melwaen dans son bureau, les deux eldar étaient sorties et avaient croisé quelques Ombres en pleine discussion. Elles s'y étaient mêlées et le temps semblait dès lors s'être envolé tant chacun était contrent d'être là, parmi ses compagnons. Le petit groupe avait fini par s'asseoir auprès de la grande cheminée du salon des Ombres. La conversation allait bon train, chacun racontant ce qu'il vivait et la nuit finit bientôt par tomber. Elle n'aurait su dire pourquoi mais voir ainsi le ciel se parsemer d'étoiles rappela à la menestrelle une chanson qu'elle affectionnait tout particulièrement. Elle eut alors la bêtise d'en parler à voix haute et bien évidemment une des Ombres s'empressa de récclamer qu'elle la joue.
Ceux qui connaissaient un peu la timidité de l'elfe n'auraient pas été surpris de la voir s'empourprer comme elle ne manqua pas de le faire. Andewen était toujours mal à l'aise en public, elle fuyait la foule. Elle aimait jouer de la musique, et selon les dires de certains le faisait plutôt bien, seulement elle ne parvenait pas à jouer en public. Il n'y avait que devant de rares personnes qu'elle acceptait de sortir sa harpe et d'en faire vibrer les cordes de ses doigts fins. Depuis qu'elle était chez les Ombres, elle avait tout de même fait quelques progrès. Elle se sentait relativement à l'aise parmi eux et portait une grande affection à ceux qu'elle avait la joie de côtoyer. Aussi prenant sur elle, elle s'adressa à eux. D'abord les mots lui vinrent difficilement, elle n'aimait pas sentir ainsi peser sur elle tous ces regards. Elle se laissa ensuite emporter par l'histoire, la mélodie trottant dans sa tête et lui soufflant ce qu'elle devait dire. Voici ce que ceux qui étaient présents ont entendu :" Avant même que de vous faire écouter la musique, je me dois de vous dire quelques mots sur celui qui la composa.
Il y a fort longtemps dans le Pays de Bree vivait un jeune homme. Il demeurait avec sa famille dans une petite ferme au sud. Sa vie était paisible et simple. Ses parents l'avaient appelé Audric. A leur grand désarroi, il se désintéressait des travaux de la terre et de l'élevage des quelques bêtes qu'ils possédaient. C'était un garçon solitaire et rêveur. Il passait le plus clair de son temps à se balader et à jouer du vieux luth de son père. Il avait appris quelques accords et depuis lors n'avait cessé de jouer. Il aimait interpréter certains morceaux comme ceux que l'on peut entendre en passant près du Poney fringant. Mais ce qu'il préférait par-dessus tout, c'était composer sa propre mélodie. Il y mettait des paroles et ses parents bien trop accaparés par leurs tâches auraient été bien incapables de dire ce qu'elles racontaient. Audric était un jeune homme comme tant d'autres, il ne s'illustra pas dans de grands combats ou comme artisan, non. Cependant il est une de ses chansons que de nombreux habitants du Pays de Bree connaissent encore et que bien des amoureux fredonnent à la damoiselle ayant leur faveur même aujourd'hui après tant d'années passées. Moi même je la joue parfois, comme bien des menestrels. Si vous prêtez une oreille attentive à mon récit je vais vous conter comment elle est née.
Audric donc rêvait mais pas à n'importe quoi. Il ne souhaitait pas devenir prince ou roi, il ne voulait pas trouver une fortune et demeurer riche jusqu'à la fin de sa vie. Ce que voulait notre jeune ami s'était rencontrer une femme et là encore pas n'importe laquelle. La dame de ses pensées était d'une grande beauté, il avait imaginé son visage et jusqu'à chacun de ses traits. Elle avait des yeux plus bleus que l'azur du ciel et si pétillants qu'on aurait dit qu'une constellation y trônait. Elle avait des lèvres d'un rose si pur que n'importe qui en aurait eu le souffle coupé. Son cou était gracile et sa peau si tendre que l'on pouvait le deviner sans oser même la caresser. Cette image le hantait nuit et jour, il la voyait se refléter dans le cours d'eau qui serpentait derrière la ferme, dans le feuillage des arbres, dans la douceur du vent. A chaque seconde elle était devant ses yeux et ne le quittait jamais. C'était un doux rêve qu'il faisait là et qui paraitrait à bon nombre de mortels comme inaccessible. Et pourtant...
Pourtant par une soirée d'automne, Audric était comme à son habitude assis sur la souche d'un arbre, se laissant aller dans ses songes. Inutile de vous dire de quoi ils étaient peuplés, vous l'aurez deviné. Alors un bruissement retentit, une branche sa cassa et il vit surgir comme une apparition céleste dans le soleil couchant. C'était elle qui se tenait devant lui, elle était exactement semblable à ses rêves. On eut dit qu'il l'avait dessiné dans l'air et qu'à force de volonté elle avait pris vie. Les rayons de l'astre lumineux nimbaient tout son être et donnaient des reflets d'or à sa chevelure auburn. Elle portait une robe bleu. Même si dans le contre jour il ne pouvait bien distinguer son regard, il devinait qu'il en avait la couleur et le même éclat que celui qu'il avait imaginé. De surprise et d'émerveillement il ne put prononcer un mot. Que dire à une apparition divine? Aucun mot n'aurait pu être digne de sa beauté, non cela était impossible. Il se contenta de la regarder ne sachant plus s'il songeait ou s'il était bel et bien éveillé. La belle resta silencieuse elle aussi, puis comme elle était apparue, elle s'en alla. Le jeune homme ne pouvait se résoudre à la laisser filer ainsi alors il la suivit. Elle avait remarqué son manège mais Lena puisque tel était son nom ne s'en soucia pas. Elle vivait à Bree et y était née. Elle était fille d'une famille de commerçants. Elle n'ignorait pas sa beauté et l'attrait qu'elle provoquait chez la gente masculine. Elle en jouait à sa guise. Au grand malheur d'Audric, elle ne considérait pas un simple garçon de ferme comme intéressant. Elle rentra tranquillement chez elle et lui claqua presque la porte au nez. Le pauvre jeune homme ne pouvait le croire, la Dame de ses pensées existait, elle était réelle. Elle était bel et bien un être fait de chair, avec une vie propre.
Dès lors chaque jour il vint se placer devant chez elle. Il attendait qu'elle sorte ou qu'elle rentre et la suivait où qu'elle aille. Il ne disait rien, ne l'accostait pas. Il se contentait de la contempler en attendant de trouver les mots qui seraient dignes d'elle. Elle en retour l'ignorait tout bonnement. Des jours passèrent et il lui vint une idée. Il était malhabile avec le langage mais peut être qu'il aurait l'inspiration grâce à la musique. Le soir venu il composa une mélodie qui exprimait à la fois son amour et sa joie de savoir qu'elle existait. Il décrivit sa beauté et même si les mots lui semblaient fades il espérait bien qu'elle en serait touchée. Il racontait comment il l'avait imaginé sans oser l'attendre, qu'il avait dessiné son visage dans les étoiles et qu'un jour la constellation porterait son nom. Il avait grande hâte que le lendemain vienne et la nuit lui parut longue avant que le jour ne se lève. Il dormit peu et au petit matin, se mit en route pour la ville. Avec impatience il se rendit devant sa maison et se mit à jouer sa sérénade sous ses fenêtres. D'abord intriguée, la belle alla ouvrir et se plaça au balcon pour l'écouter chanter. Elle fut flattée que l'on lui dédie une chanson toutefois à ses yeux cela n'avait pas grande valeur surtout venant d'un fermier. A peine le morceau fini elle retourna à ses activités sans plus se soucier de lui. Audric était dépité mais il s'entêta. Elle était faite pour lui il ne pouvait en être autrement. Chaque jour comme à son habitude il venait devant chez elle et lui interprétait son morceau, son ode à sa dame, à sa beauté et à l'amour qu'il éprouvait pour elle. Chaque jour hélas, Lena restait murée dans son indifférence et son dédain. Seuls les voisins et les passants semblaient apprécier sa musique et il fut vite connu comme le chanteur aux étoiles.
D'autres jours passèrent et la demoiselle fut lasse de l'entendre jouer et de voir tous ses badauds agglutinés à sa fenêtre sans que ce soit pour ses beaux yeux. Alors elle alla le trouver pour le convaincre de s'en aller. Elle lui envoya à la figure qu'il n'était pas digne d'elle. Le pauvre garçon en eut le cœur brisé, pourtant il ne pouvait être que de son avis. Elle était la grâce et la beauté personnifiée. Comment aurait il pu la mériter? Sa vie sans elle n'aurait aucun sens aussi il la supplia de lui dire ce qu'il pouvait faire pour la conquérir. La belle voyant là un moyen de se débarrasser de lui, lui promit de lui donner sa main s'il faisait comme il le racontait dans sa chanson et parvenait à dessiner son visage dans les étoiles. S'il faisait cela, s'il réussissait à dicter la place de ces lumières au firmament, il deviendrait assez puissant pour être digne d'elle. Audric ne pouvait le lui refuser . Il aurait été prêt à tout pour gagner le cœur de celle qu'il avait tant rêvé sans oser l'espérer. Il rentra chez lui et pensa. Il réfléchit pendant des jours et des jours pour trouver un moyen de la satisfaire. Il alla trouver les plus grands mages, les êtres ayant acquis le plus de savoir pour trouver la solution. Mais personne ne semblait pouvoir l'aider. Seule la Dame aux étoiles, la puissante Elbereth avait ce pouvoir. Il la pria, la supplia de changer les étoiles de place pour lui. Il avait beau scruter le ciel, il restait immuable malgré son chagrin. Un an avait passé depuis la dernière fois qu'il avait vu sa belle ce jour là. Il brûlait de la revoir pourtant il n'avait pas la force de le faire avant d'avoir accompli sa tâche. Le chagrin et la folie le submergeaient chaque jour un peu plus. Comment vivre en sachant que le bonheur est devant vos yeux sans que vous ne puissiez le toucher, le sentir, le goûter, l'approcher même? Il n'était plus qu'une ombre et n'avait goût à rien d'autre. Il finit par se laisser mourir.
Pendant ce temps les jours de Lena s'écoulaient comme si rien ne s'était passé. Elle repoussait chacun de ses soupirants, jamais un seul ne semblait trouver grâce à ses yeux. Elle se sentait supérieure de par sa beauté et elle comptait bien attendre de faire un mariage digne d'elle. Seulement les années passèrent et à force d'être toujours rabroués, plus aucun homme n'osait venir lui faire la cour. Les années firent leur œuvre sur son visage et les rides en cachèrent la beauté en même temps que la jeunesse s'en allait. Elle se retrouva vieille et seule. Et les passants racontent qu'ils l'entendaient souvent se parler à elle-même, disant combien elle avait été belle et aimée, que même un jeune fermier lui avait composé une chanson. Assise au coin du feu la pauvre femme fredonnait l'air et seules quelques paroles revenaient à sa mémoire. Elle chantait alors que les étoiles même reconnaissaient ses charmes et séduites elles aussi rendaient hommage à ses traits en dessinant son visage dans les cieux.
Mon récit peut vous paraître triste et amer. Mais peut être y verrez vous une leçon. L'on est si beau que dans le regard d'un être qui nous aime et l'amour est la seule richesse sans laquelle le bonheur est impossible. Et si vous vous promenez à Bree en un jour prochain, prêtez l'oreille peut être entendrez vous fredonner la sérénade du chanteur aux étoiles. Si vous interrogez les plus vieux du pays, ils se souviendront sans doute encore d'Audric et de sa Lena. Certains vous raconteront même qu'à sa mort une constellation nouvelle est apparue. Elbereth la déesse de la lumière aurait été sensible à cette histoire et lui aurait accordé ce dernier vœu. Alors la nuit tombant vous tournerez votre visage vers la voûte céleste et chercherez les étoiles dessinant le visage d'une humaine qui croyait trop en sa beauté." | |
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