Ce Fameux Soir -Récit I des soeurs Atanys et Leilla-

Prélude et Avertissement :

Avant de vous plonger dans ce récit, il est important que vous soyez avertis. Ce qui sera dit n'est issu que de vagues souvenirs, qui seront parfois flous et sans queue ni tête. Cela est dû au fait que les deux personnes qui racontent leur histoire ne sont pas toujours sures de la fiabilité de ce dont elles se souviennent. Nous nous nommons Atanys et Leilla, nos noms de familles n'ont pas l'ombre d'une importance, puisque nous n'avons nous même aucune once de cette importance. Qu'importe ce que nous soyons, qu'importe ce que nous étions cela n'aura pas beaucoup d'impact sur le récit qui va suivre, du moins dans un premier temps. Si vous êtes là pour comprendre des choses, mieux vaut passer votre chemin, si vous êtes là pour interpréter des événements, mieux vaut que vous passiez aussi votre route. A présent nous allons vous raconter le début de nos aventures, du moins le début tel qu'on s'en souvient, nous procéderons par scène, par lieu, par moments, nous procéderons comme nous pouvons le faire, de la façon la plus précise qui sera, que le creux de nos souvenirs nous le permette.

Scène I : Une forêt quelque part, sur le flanc d'une montagne à la tombée du jour.

Leilla et Atanys marchaient encore avidement.
Les bois étaient tous les mêmes dans la région où elles se trouvaient et la monotonie de cet environnement les déprimait lentement mais sûrement. Que pouvaient faire deux Elfes pour changer le monde dans lequel elles se trouvaient ? Absolument rien. En réalité, de toute façon, aucune des deux créatures n'étaient là pour ça. Atanys se promener toujours de la même façon, bougeant d'un arbre à l'autre, fermant les yeux parfois pour sentir le vent sur son visage. Les pends de son ample manteau qui recouvrait son armure volaient un peu de toutes parts au moindre courant d'air. Mais jamais elle ne parlait trop, de même que jamais Leilla n'élevait la voix au delà du murmure. D'ailleurs la princesse se trouvait là elle aussi, le visage assombri par une ample capuche en velours noir. La jeune aristocrate se donnait toujours des airs, même dans les coins les plus reculés de la terre du milieu. Mais soit, tant que sa robe ne l'empêchait pas de courir, Atanys n'y voyait aucun inconvénient. Le maître du savoir se tourna derrière elle lorsqu'un petit grognement la fit tressaillir. C'était les bruits que ferait un ours. Par endroit, l'Elfe de la Lorien eut le sentiment de voir un esprit, un fantôme, celui d'un animal. Pour Leilla elle devenait folle, mais pour Atanys, c'était un message de la nature qu'on lui adressait et sans attendre, le maître du savoir tira son bâton de derrière son dos et commença à en coller le bas contre le sol, tapant une fois, puis le relevant avec fermeté devant elle, arrêtant son bras net sur toute sa longueur. Regardant vers le ciel, les pupilles d'Atanys le reflétèrent un instant et alors que l'Elfe leva la main, une immense lumière jaillit du bâton pour remonter le long de son corps et venir se concentrer dans sa main. La peau d'Atanys qui était si pâle s'éclaircit encore, la rendant presque scintillante aux yeux de Leilla et la tenue noire du maître du savoir créa alors un énorme contraste avec sa magie. Au milieu de nulle part se forma alors petit à petit la silhouette d'un animal, assez grand mais pas trop non plus. C'était un ours magnifique dont l'esprit à la base transparent se matérialisa. Atanys se tourna alors vers Leilla et lui adressa un petit regard inquiet.

-C'est Kodha. Un vieil ami avec lequel j'ai traversé de nombreuses aventures. Il fait parti du peuple des ours et nous avons tous deux perdu beaucoup de choses depuis le début. Il passe un nuage sombre au dessus de ces bois.

Leilla était toujours très troublée par les pouvoirs de son amie.
Elle avait elle même les siens mais jamais elle n'avait observé quelque chose du genre. Sauf peut être les fois où elle avait eu la chance de parler à un certain Gandalf le gris, ainsi qu'à sa caste pour le moins aussi bizarre que l'était le maître du savoir. La jeune princesse déchue remonta la manche d'une de ses bottes le long de sa jambe, pour se mettre plus à l'aise dans la marche qu'il leur restait à effectuer. Mais c'était davantage pour être à l'aise dans l'action qui allait suivre, car par ses dons de voyances, Leilla savait déjà que dans à peine quelques minutes, elles seraient attaquées ...

-Tu fais bien de rester sur tes gardes. Ce que j'ai rêvé la nuit dernière était de bien mauvais présage car j'ai déjà vu cette scène et elle finissait mal.

Un petit gloussement, comme un petit rire narquois, retentit dans les bois, fendant l'air d'un froid agressif qui hérissa le poil de l'ours. L'animal s'éleva alors sur ses deux pattes, montrant ses crocs menaçant tout en inspirant profondément l'air pour tenter de flairer la présence d'un ennemi. Atanys connaissait bien cette situation, elle connaissait bien ces petits gloussements. C'était des Gobelins, le genre de créatures qui n'est pas dangereuse lorsqu'elle est seule mais qui peut être mortelle si elle se déplace en groupe. Malgré leur stupidité passagère, les Gobelins demeurent des êtres très organisés, appréciant les combats à distance par le biais de leurs arcs. D'ailleurs, le bruit d'une flèche qui fend l'air mit tous les sens d'Atanys en alerte. Le projectile apparut enfin à travers les arbres, fendant droit sur elle. Le maître du savoir voulut élever son arme, mais à peine eut elle tenté d'esquiver que la pointe en fer de la flèche s'enfonça dans son épaule.

-Ah ! Leilla ! Cours !

La jeune princesse hésita, au début elle n'accepta pas de fuir mais l'ours se montra alors menaçant, la bousculant dans un fourré d'un lourd coup de patte pour l'y dissimuler. Des silhouettes apparurent dans la brume qui s'était levée, à travers la pénombre grandissante. Prise d'une panique soudaine, la jeune Elfe se mit à courir à toute vitesse. Atanys tira la flèche de sa chair, poussant un soupir de douleur au passage. L'Elfe releva son bâton et fit un mouvement en demi cercle, disparaissant d'un seul coup, se camouflant derrière un arbre pour attendre les créatures. Alors que les bêtes immondes et puantes se rapprochaient, le maître du savoir fut troublée par leur souffle retentissant, une respiration qui la projeta bien loin en arrière, l'expédiant dans un souvenir qui l'emprisonna dans ses pensées un bref instant.


-Atanys ? Mon enfant, où est ta mère ? Réponds moi Atanys ! Elle n'est pas encore rentrée ? Atanys ! S'il te plais répond !

L'enfant Elfe fixa son père d'un regard trouble, sa blouse d'écolière immaculée de sang, allongée au beau milieu d'une pièce de sa maison. Son père la fixait avec une inquiétude énorme, ses longs cheveux blonds, comme les siens, volant au gré des courants d'air et ses magnifiques yeux scintillants d'une lueur d'inquiétude. Le père d'Atanys était un archer de la Lorien, très habile à l'arc et doué de l'épée, mais pas vraiment fait pour le corps à corps. L'enfant tenta de recouvrer la mémoire des derniers événements, alors que partout au dehors retentissait le corps de la Lorien. Le père d'Atanys lui adressa encore quelques mots.

-Le village est attaqué par des Gobelins associés avec des Orques, Atanys, pourquoi es-tu pleine de sang et où est donc passée ta mère ? Vite ma fille, je t'en conjure réponds moi.

Mais le temps pressait et le père d'Atanys dû la laisser en sécurité dans la maison pour sortir repousser l'attaque. Alors qu'au dehors la lutte faisait rage, la jeune Elfe ferma les yeux et s'endormit pour de bon, ne s'éveillant que le soir, seule, sa petite soeur pleurant au dessus de son corps inerte depuis plusieurs heures.

-Lorhana, qu'est-ce qui t'arrive ? Où sont maman et papa ?

La petite Elfe, âgée d'à peine quelques année semblait ne pas être en état de répondre. Le père des deux enfants entra alors dans la pièce, couvert de saleté et l'arc à la main. Atanys s'avança pour lui sauter dans les bras mais il l'écarta sur le côté, brandissant son arme vers Lorhana.

-Ma chérie, pousse toi, il y en a un qui se cache ici, pousse toi.

Atanys, voyant alors une ombre bouger derrière sa soeur se précipita sur celle-ci pour l'écarter, son père hurla, mais elle n'en teint pas compte. Poussant Lorhana, la jeune Elfe se trouva face à un immense Orque, puant, armé d'une épée prête à fendre le vent pour la mettre à mort. Au moment où Atanys ferma les yeux, prête à accepter son destin, un immense grognement retentit et le mur du salon explosa sous l'impulsion d'un animal au poil roux. Un ours énorme pénétra dans la pièce pour dévorer l'orque sans pitié. Le père Elfe vint alors reprendre sa fille qui tendait les mains en pleurant vers l'animal qui venait de la sauver. Lorhana et Atanys se retrouvèrent avec leur père au dehors de leur maison, au beau milieu des bois qui étaient plus froids et silencieux que jamais.




Atanys revint à elle, une larme coulant le long de sa joue. Ce soir, qui avait été le plus marquant de toute sa vie était aussi le soir durant lequel elle avait retrouvé le cadavre de sa mère aux aurors. Les Gobelins étaient là, Atanys pouvait les sentir, les entendre, son ours jaillit de nulle part avec puissance pour débuter l'attaque. Le maître du savoir observa alors son bâton avec avidité, le caressant du bout des doigts de la main gauche. Atanys sacrifia alors son invisibilité pour entrer en lutte. Sans attendre des archers tirèrent des flèches sur elle, l'Elfe les esquiva aussitôt en brandissant son bâton éclairé, ce qui eut pour effet de briser les flèches avant qu'elles ne l'atteignent. Mais bien vite, alors que le combat semblait en bonne voix, le coeur d'Atanys cessa net de battre lorsqu'elle entendit le hurlement d'une voix qui lui était familière ...

-LEILLA !!!

Sans attendre, Atanys éleva son arme vers le ciel, regardant droit dans les yeux la magnifique lune qui trônait dans la nuit. En un instant, le bâton se mit à scintiller à nous et un énorme rayon lumineux jaillit du ciel pour aveugler tous les Gobelins, les paralysant dans un état de peur violente. Une fois immobilisés, Atanys enclencha son arme dans l'attache qu'elle portait dans le dos puis elle groupa les deux mains pour faire apparaître en leur creux une graine de feu qui se mit à grandir lentement. Une fois que celle-ci fut portée à maturité, Atanys l'envoya sur ses victimes qui se mirent à brûler. Les cheveux bruns de l'Elfe qui était blonde autrefois commencèrent à s'élever dans le vent, comme un noeud de tentacules féroces.

-Kodha ! Retrouve là ! Vas chercher Leilla !

A quelque pas de là, la jeune princesse était complètement hors d'haleine. Elle courrait de toutes ses forces, avançant toujours plus vite, plus vite ... Jusqu'à ce cul de sac. En face se dressait une énorme masse rocailleuse, à droite des ronces lacérantes, à gauche une autre masse rocheuse, derrière, les Gobelins. L'Elfe de Lindon tira alors une Luth scintillante de sous sa cape, commençant à gratter les cordes pour en faire sortir une mélodie envoûtante. Lorsque les monstres qui la poursuivaient arrivèrent face à elle, ils s'arrêtèrent tous soudainement, l'observant d'un air hébété.

-Maintenant les enfants, on va voir si vous savez valser.

Tirant discrètement une épée de son fourreau, la princesse la lança directement sur l'un des Gobelins, le transperçant avec violence. Reprenant son arme, elle en décapita un autre puis reprit son instrument. La voix mélodieuse de l'Elfe commença à s'élever dans l'immensité des bois, mélangée à des murmures comme venus d'outre tombe. La princesse poussa alors un hurlement terrifiant qui réduit en miette trois de ses assaillants. Il n'en restait qu'un, du moins elle le croyait, qu'elle assomma d'un coup de Luth.

-Hé hé hé. Vous êtes vraiment pas né d'hier vous.

C'est alors qu'un Gobelin s'élança d'un arbre pour lui décocher un coup. Leilla pensait que c'était fini lorsqu'elle vit arriver trois autres spécimen, mais c'est alors qu'une explosion de lumière venue des bois les aveugla tous. D'énormes masses d'air s'engouffrèrent sur les lieux et lorsque Leilla put y voir un peu plus clair, elle aperçut le visage de son amie, meurtrie par de nombreuses veines noires circulant partout sur son visage. Se frottant les yeux pour être sure que c'était bien elle, l'Elfe commença à sentir un certain mal être, comme si la personne qui se trouvait devant elle n'avait plus rien de bon. Les Gobelins naturellement se jetèrent sur Atanys qui les emprisonna aussitôt par de petites tornades. Une fois qu'ils s'y trouvèrent enfermés, elle les pulvérisa à l'aide d'autres boules de feu, similaires à celle qu'elle avait lancé avant. Atanys les brûla jusqu'à ce que les créatures ne soient que de petits tas de cendre. Une fois qu'elle eut sauvée son amie, l'Elfe tomba au sol, sa lumière s'évanouissant avec elle.

-Atanys ?

Leilla accouru vers son amie et elle toucha alors le front brûlant du maître du savoir. L'ours qui l'accompagnait était là, assis à côté, la fixant avec inquiétude. Leilla tira de nouveau son instrument, commençant à jouer une autre mélopée qui cette fois semblait soigner Atanys. Les vêtements de l'Elfe se réparèrent d'eux mêmes, au même moment ses blessures se refermèrent. Mais pendant que Leilla faisait son oeuvre, Atanys était à nouveau plongée dans un songe.

-Je suis désolée Gimir, tu sais que la Reine de la Lorien ne nous a pas envoyé pour aider ton peuple. J'aurais voulu te prêter main forte mais ce ne sont pas nos ordres.

Atanys se tenait devant un nain vêtu comme un aristocrate, tous deux étaient debout sur un balcon de pierre, admirant les feux d'un campement qui était occupé à la fois par des Nains, des Elfes et très peu d'hommes. Un jeune Elfe brun, vêtu comme une sentinelle pénétra sur le balcon, un air dédaigneux sur le visage. Il se nommait Ravan et ils faisaient la course à Atanys depuis le début de leur périple, depuis l'instant même où ils avaient eu pour projet de partir en mission de reconnaissance pour la Lorien. L'Elfe observa ses mains pour être sur qu'elles n'étaient pas sales puis il effleura le visage d'Atanys, remettant une mèche de ses longs cheveux blonds derrière son oreille.

-Si je puis me permettre, mon général, nous avons largement les moyens d'aider ces nains. Si comme ils le disent des orques approchent pour se rendre au Mordor, ce ne serait pas un mal de les arrêter je crois ... Mais je ne suis qu'une sentinelle, je couvre vos arrières, je passe devant, je frappe, je tue par millier mais niveau stratégie ...

Atanys attrapa la main de la sentinelle, la ramenant sur son torse et retirant la sienne sèchement.

-Laissez moi le soin de décider Ravan. Nous passeront la nuit ici, je pense que nous ne courrons aucun risque en restant là ce soir. Nous ne sommes pas trop à découvert et les nains et les quelques hommes sont fatigués. Dormez en paix, nous Elfes veilleront sur vous en cette magnifique nuit. Et puis, en théorie, nous ne risquons rien aux abords de cette route, elle mène aussi vers l'Isengard.

Et la jeune femme plongea son regard sur la lisière de la forêt au loin. Fangorn était un lieu de mystère que l'Elfe aimait par dessus tout. Elle savait que les gardiens de la forêt y logeaient et qu'ils n'aimaient pas les orques. Il leur faudrait être fou pour s'aventurer à l'intérieur. Atanys discuta encore un peu avec le nain puis elle décida de regagner son poste pour tenter de dormir un peu. En passant près d'un feu, l'Elfe croisa une jeune femme dont les cheveux flamboyant la rendaient magnifique. Un peu intriguée par cette cavalière, Atanys voulut en savoir plus.

-Qu'est-ce qui a bien pu vous mener si loin de chez vous ?

La femme adressa un sourire à l'Elfe avant de lui répondre.

-Vous savez, nous sommes inquiets pour de récents événements. Si les Elfes et les nains mènent déjà leurs enquêtes en secret, pourquoi pas nous après tout ? Il y a beaucoup d'orques qui circulent là ces derniers temps, ce n'est pas pour nuire à mon peuple que de me trouver là pour en éliminer un maximum. Vous êtes si belle, je n'avais encore jamais une Elfe d'aussi prêt, pourtant, nous ne sommes pas si éloignés.

Atanys sourit à son tour. Il est vrai que son peuple était discret.

-Je vous le concède, c'est une bonne idée de venir ici en prévention. Nous faisons de même. Je suis une Elfe de la Lorien au service de notre Reine. Nous avons monté une unité d'élite pour mener quelques enquêtes dans cette région. Pour les orques également. Nous pensons aussi qu'il n'est pas normal qu'ils affluent à ce point en si peu de temps. Mais tout me laisse penser qu'il y a une activité anormale vers les régions de l'Angmar et de ... De l'Isengard. Je me nomme Ellana.

La jeune femme inclina la tête.

-Moi c'est Leahna, pour vous servir.


Atanys se leva alors dans un énorme sursaut, observant les bois tout autour d'elle. Le jour était en train de se lever et Leilla avait monté le camp toute seule. Elle avait aussi allumé un feu sur lequel elle faisait cuir un peu de viande qu'elle posa sur du pain Elfique. "Ellana" ? Voilà un nom qu'elle avait oublié depuis longtemps, son propre nom ...

Scène II : A la lisière de Fangorn.

Les jours se faisaient étrangement moins longs.
Il y avait des heures de marches qui séparaient Leilla et Atanys du lieu de leur dernière aventure avec les Gobelins. Les pieds des deux elfes les faisaient horriblement souffrir lorsqu'elles se décidèrent enfin à faire une courte pause. Les deux compagnes de route n'étaient pas fanatiques de ce genre d'environnement pour s'arrêter, car un gros nuage sombre recouvrait leur tête. Sûrement un nuage de fumée. Dans la prairie sur laquelle elles marchaient, on pouvait apercevoir la lisière menaçante de Fangorn. Atanys s'approcha des arbres sans craintes, bien qu'elle y sentit une sorte de malaise profond. Leilla elle était plus hésitante, mais elle accepta tout de même de s'approcher.

-Les arbres sont malades ... Comment peuvent-ils dépérir à ce point sans que personne n'ait pu s'en rendre compte ? Leilla. Sois prudente, j'ai un mauvais pressentiment quant à cette forêt, le mal rode non loin d'ici.

Mais la princesse était déjà figée sur autre chose.
Leilla était là, immobile, fixant le ciel avec une lueur anormale dans le regard. Atanys ignorait quoi, mais elle sentit aussitôt un semblant de tristesse chez son amie. Il y avait quelque chose d'anormal en elle aussi. Leilla était perdue dans ses pensées, observant la fumée noire au dessus de sa tête. La jeune Elfe avait déjà vu cela un jour, elle connaissait ces nuages grossiers plein de ténèbres. En fait, elle en avait déjà vu un jadis, il y a longtemps, très longtemps, juste au dessus de la maison dans laquelle elle avait grandit. Mais ce ne fut pas suffisant pour la capturer dans ses souvenirs, aussi elle ramena son attention à Atanys lorsque cette dernière lui adressa la parole. Leilla tenta tant bien que mal d'élargir les lèvres pour sourire mais elle n'y parvint qu'à moitié.

-Je ... Je vais bien, trouvons de l'eau pour nous rafraîchir. Mais ne traînons pas, je n'aime guère ces nuages, ils entament mon moral.

Et l'Elfe ménestrel s'engagea par delà la lisière de la forêt, presque invisible au milieu de la pénombre. Atanys observa son amie un instant puis non sans peur elle s'engagea elle aussi. C'est alors un monde merveilleux qui s'offrit à elle. Fangorn était paisible mais parfois le murmure du vent transportait avec lui les paroles de la nature, des paroles qu'Atanys pouvait comprendre. La lumière était faible mais quelques rayons passaient encore, faisant briller parfois la cime des arbre comme de jolies paillettes d'argent. Par endroit de petites lucioles se promenaient, faisant briller ce monde déjà à ce point féerique. Leilla ne s'était encore aperçut de rien, jusqu'à ce qu'elle trébuche légèrement contre une souche, ce qui eut pour effet de la faire dégringoler en bas d'une petite bute, après un buisson.

-Atanys !

Le maître du savoir se mit à paniquer en voyant tomber son amie, aussi elle tira son bâton. Hésitante, l'Elfe leva son arme devant son visage et souffla quelques mots dessus. Le bout de la canne se mit alors à scintiller d'une lueur magnifique et la pénombre s'estompa davantage. Atanys descendit la petite bute après le buisson et elle se retrouva alors devant un petit étang dont la lumière créait à sa surface de magnifique reflets. Un peu comme celui du mitril sous les rayons de la lune.

-Leilla ? Tout va bien ?

Lorsqu'Atanys prononça ces mots, les feuilles des arbres semblèrent s'agiter. Le sol trembla légèrement. L'espace d'un instant, Atanys eut le sentiment de voir une immense silhouette se déplacer au loin. Peut-être un arbre gardien ? Le maître du savoir s'approcha de Leilla et elle déposa une main sur son épaule. N'osant trop rien dire, elle tenta de comprendre quel point dans l'horizon son amie fixait de nouveau avec tant d'avidité. Leilla observait une statue délabrée, qui ornait un petit sanctuaire à l'abord de l'étang. La princesse ne dit rien, plongée dans ses pensées, cette fois, la tentation était trop dure, Leilla s'enfonça peu à peu dans ses souvenirs ...


Leilla était allongée, bien au chaud sous une couverture de soie. Cette nuit là, les rideaux de sa chambre volaient au gré d'un vent surnaturel. L'Elfe frissonna quelque peu, inquiète de savoir ce qu'il pouvait bien y avoir au dehors pour que le temps soit aussi sinistre. Dans l'immense chambre de pierre blanche, tout était calme, sauf peut être la harpe de Leilla qui résonnait parfois un peu comme un appel. La jeune Elfe avait déjà vu toute cette scène, elle avait déjà aperçu ce moment, sans imaginer qu'elle le vivrait. Mais ce soir là, la princesse n'avait pas encore assez confiance en elle pour se lever et partir en courant, afin de fuir un danger imminent et sauver ainsi sa famille. Regardant attentivement autour d'elle, Leilla se redressa quand un bruit lourd retentit au dehors. La jeune Elfe ne comprit pas, se demandant ce qui pouvait bien causer un tel vacarme. Se relevant doucement, la princesse inspecta la pièce, ouvrit la porte de sa chambre pour observer les couloirs ... Mais rien ne semblait anormal. Un courant d'air frais lui rappela donc que la fenêtre était ouverte ... Se retournant, la magnifique enfant pu apercevoir une drôle de fumée entrer par l'ouverture. D'où cela pouvait-il bien venir ? Le coeur de Leilla se mit à battre plus que jamais ! A tel point qu'elle posa une main sur sa poitrine pour s'empêcher de respirer si fort.

-Mère ?

Interrogea-t-elle dans le vide en entendant de petits éclats de voix au loin ...
Leilla se pencha alors enfin à la fenêtre, au dehors, un feu avait était allumé, c'était même les portes de la résidences qui étaient en train de brûler. De partout, des hommes en noirs hurlaient : "Disgrâce !" L'enfant eut alors envi de courir, mais à peine la jeune Elfe eut-elle pu saisir de quoi se vêtir un peu mieux et des chaussures que quelqu'un pénétra dans la pièce.