Ses pensées survolaient sur le dos d'un grand aigle, une mer de coton noyée dans l'horizon. Thuranor le sentait, son périple s'achevait car le chant etait clair, et La voix toute proche. il plongea dans les nues et d'en haut l'apperçut, assise à ses côtés dans le clair d'une forêt...D'une lente litanie, elle invoquait son nom, intimant son retour par delà terre et mer...
Revenant peu à peu du monde des esprits, le capitaine obéit au laï qu'en Evendim jadis il n'avait reconnu, lorsqu'un bel oiseau de lumière lui était apparu...
...et il ouvrit les yeux sur le visage radieux et le charme voluptueux de la douce Andewen.
L'homme du Gondor reposait sur un tapis d'herbe tendre, une douce lumière dorée descendait en cascade depuis la canopée, le chant de la ménestrelle, apaisant, montait vers les nuées. Au milieu de la clairière tapissée de fleurs blanches, le dunedain allongé, vêtu d'une robe noire aux broderies raffinées, vivait rêve éveillé. L'elfe majestueuse était assise en amazone à son chevet et tamponnait son front à l'aide d'un linge immaculé exhalant l'athelas et le niphredil. Son chant était un murmure soufflé par les Ainur, ni triste ni joyeux ou peut-être les deux à la fois. Elle lui souriait tendrement et lissait de ses doigts la chevelure parfumée du capitaine enfin réanimé.
Dans les yeux de la ménestrelle naquit alors une petite étoile qui devint une larme. Roulant sur sa joue, la petite perle alla se cacher dans l'ourlet de ses lèvres, avant d'être dérobée par un tendre baiser. Thuranor sur ses coudes s'était hissé afin de l'embrasser, il voulut alors parler mais un index délicat, sur sa bouche posé, vint l'en dissuader.
-"Shhhhhhhhhhh..."
Ainsi restèrent-ils, longtemps, l'un contre l'autre à se regarder, car il est des silences bien plus éloquents que de simples phrasés...
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-"Suis-je toujours dans un rêve ô fille d'Elbereth?
-Dans ce cas prions que ce rêve dure toute une éternité...Je suis bien réelle et votre blessure soignée...Trois nuits et trois jours durant vous avez voyagé hors de votre corps et loin de nos contrées..."
Andewen prit l'une des mains du capitaine entre les siennes:
-"vous êtes glacé", une large cicatrice courait sur toute la paume et l'elda demanda quelque peu intriguée: "Quelle est donc cette balafre qui ne puit s'effacer, mes chants et mes onguents ne peuvent vous l'enlever".
-"La marque de Narsil qu'Ohtar nous a légué(*), la maison d'Orngiliath en frappe ses ainés...Elle rappelle à ses fils qu'espérance et souffrance sont intimement liés et qu'il est des serments dans la chair gravés afin de ne pas oublier..."
Andewen embrassa tendrement la cicatrice puis glissa la main mutilée contre sa joue. Thuranor demanda enfin ce qui lui était arrivé...
-"Nous chevauchions ensemble comme à l'accoutumée, quand un ourouk embusqué d'une flèche vous a blessé. Nous l'avons combattu et bel et bien tué mais un poison violent vous a fait perdre pied..."
Ainsi nos tourtereaux à nouveau pûrent s'aimer bravant les interdits, en toute impunité.
(*) Voir le
le splendide récit de messire Daemoth